CLAUDE ANET.
NOUVEAU TIRAGE
ROMAN.
PARIS,
AUX ÉDITIONS DE LA SIRÈNE,
No 7, RUE PASQUIER, No 7.
M. DCCCC. XX.
ŒUVRES DU MÊME AUTEUR
Voyage idéal en Italie, 1 vol.
Petite Ville, 1 vol.
Les Bergeries, 1 vol.
La Perse en automobile, 1 vol.
Notes sur l’Amour, 1 vol.
La Révolution russe (mars 1917-juin 1918), 4 vol.
Les Cent quarante-quatre quatrains authentiquesd’Omar Khayyam, traduits littéralementdu persan en collaboration avec Mirza Muhammad ;édition à tirage restreint décorée demotifs persans (à la Sirène), 1 vol.
EN PRÉPARATION A LA SIRÈNE
Tsar Saltan, traduit littéralement de Pouchkine,illustré et décoré par Mme Gontcharova,1 volume in-4o carré.
Notes sur l’Amour, avec vingt-et-un dessins dePierre Bonnard, 1 vol.
(EN MANIÈRE DE PROLOGUE)
Un ciel d’une limpidité presque orientale,un beau ciel clair, lumineux,bleu comme une turquoise de Nichapour,s’étendait au-dessus des maisons et desjardins de la ville encore endormie. Dansl’aube et le silence on entendait seulementles cris des moineaux qui se pourchassaientsur les toits et sur les branches des acacias,les roucoulements voluptueux d’unetourterelle au faîte d’un arbre et, au loin,le bruit aigu que faisaient, par moment, lesessieux d’une charrette de paysan avançantavec lenteur sur les pavés irréguliersde la Sadovaia, la grande rue de la villeet la plus élégante. Près de la place de lacathédrale, immense, poussiéreuse, déserte,une clôture en bois fermait la courde service de l’hôtel de Londres, dont laplate et longue façade de trois étages, bâtieen pierres grises et maussade comme unjour d’automne pluvieux, s’alignait sur laSadovaia, sans balcons, sans pilastres, sanscolonnes, sans ornements.
L’hôtel de Londres, le premier de laville, était renommé pour sa cuisine. Lajeunesse dorée, les officiers, les industrielset la noblesse patronnaient son restaurantcélèbre où un orchestre composé de troisjuifs maigres et de deux Petits-Russiens,jouait, après-midi et soir jusque tard dansla nuit, de médiocres pots-pourris d’EugèneOnéguine et de la Dame de Pique, de mélancoliqueschansons populaires et desairs tziganes aux rythmes heurtés. Que departies de plaisir s’étaient données dans cerestaurant à la mode, que de soupersbrillants, que d’« orgies » pour employerl’expression en usage chez nous lorsqu’onparlait des fêtes de l’hôtel de Londres !
Le restaurant de l’hôtel se composait dedeux salles inégalement grandes. Mais iln’avait point de cabinets particuliers. Aussiles gens désireux de souper à l’écart de lafoule prenaient-ils au premier étage deschambres avec salon que Léon Davidovitch,le portier de l’hôtel, gardait toujours librespour ses clients.
Ce Léon, un juif