HISTOIRE
DE FRANCE

PAR

J. MICHELET

NOUVELLE ÉDITION, REVUE ET AUGMENTÉE

TOME DOUZIÈME

PARIS
LIBRAIRIE INTERNATIONALE
A. LACROIX & Ce, ÉDITEURS
13, rue du Faubourg-Montmartre, 13

1877
Tous droits de traduction et de reproduction réservés

HISTOIRE
DE FRANCE

(p. 1) CHAPITRE PREMIER
LE LENDEMAIN DE LA SAINT-BARTHÉLEMY.—TRIOMPHE DE CHARLES IX
1573-1574

Quoique la nouvelle sanglante produisît partout un effet d'horreur, onput croire que le sang s'écoulerait bien rapidement de la terre. Unmois après l'événement, M. de Montmorency, le chef des modérés, quin'avait dû qu'à son absence de ne pas périr au massacre, écrivit à lareine d'Angleterre pour excuser le roi (27 septembre 1572).

Deux mois à peine étaient passés, que la reine Élisabeth acceptad'être marraine d'une fille de Charles IX, et envoya un prince du sangau baptême avec une riche cuve d'or (9 novembre).

Huit mois (presque jour pour jour) après la Saint-Barthélemy, le plusgrand homme du temps, Guillaume (p. 2) le Taciturne[1], dans sadéfense désespérée contre le duc d'Albe, traita avec Charles IX, lereconnut pour protecteur de Hollande et roi de ce qu'il pourraitconquérir aux Pays-Bas. (Archives de la maison d'Orange, IV, 117, mai1573.)

Ce n'est pas tout. Louis de Nassau, l'héroïque frère de Guillaume,travaille pour que l'Empire élise un Roi des Romains, et qu'aprèsMaximilien Charles IX devienne Empereur!

Il appuie le duc d'Anjou pour l'élection de Pologne, le duc d'Alençonpour le mariage d'Angleterre.

Ainsi la maison de France, couverte du sang protestant, se présente àtoute l'Europe appuyée des protestants.

Je n'avais pas compris pourquoi, sur son tombeau et dans tels de sesportraits, Guillaume le Taciturne a le visage d'un spectre. Je croismaintenant le savoir. C'est pour avoir subi cette fatalité exécrablede boire le sang de Coligny.

(p. 3) Ces étranges phénomènes s'expliquent par la terreur quel'Europe eut de l'Espagne[2]. On crut que le coup venait de Madrid,que celui qui avait fait la Saint-Barthélemy des Flandres avait faitla nôtre; que la France, emportée si loin, allait être tout espagnole,devenir comme un poignard dans la main de Philippe II.

Hypothèse vraisemblable, très-logique, et pourtant fausse. Sans doute,une seule chose était sage au point (p. 4) de vue catholique, aupoint de vue du pape et des Guises, de la future Ligue, dont le comitéexistait déjà dans le clergé de Paris, c'était d'achever laSaint-Barthélemy avec l'aide de l'Espagne, qui offrait toutes sesforces, puis de faire à frais communs l'invasion d'Angleterre. Celaaurait tranché tout. La Hollande eût tombé d'effroi. L'Allemagne étaità genoux, et sans doute le protestantisme exterminé de la terre.

Mais, au fond, la cour de France n'était point du tout fanatique. Elleétait toute dominée par l'intérêt de famille, et partout trouvaitdevant elle, en Angleterre, en Pologne, en Allemagne, l'opposition dePhilippe II. L'Europe favorisa la France dans ses vues les pluschimériques, et l'on eut ce spectacle étrange, que, le lendemain d'unma

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