Revue, corrigée, considérablement augmentée et illustrée denombreuses figures d'après lesmonuments antiques.
PARIS
A. LÉVY, LIBRAIRE-ÉDITEUR, 13, RUE LAFAYETTE
(PRÈS L'OPÉRA)
Le fait dominant des cinquante dernières années, dans l'ordrescientifique, a été certainement la rénovation des études de l'histoireet surtout la conquête du vieux passé de l'Orient par la critiquemoderne, armée du flambeau qui fait pénétrer la lumière jusquedans les plus obscurs replis de ces annales pendant si longtempsensevelies dans l'oubli.
Il y a seulement un demi-siècle, on ne connaissait guère del'ancien monde que les Romains et les Grecs. Habitués à voir dansces deux grands peuples les représentants de la civilisation antique,on consentait sans peine à ignorer ce qui s'était passé en dehorsde la Grèce et de l'Italie. Il était à peu près convenu qu'on n'entraitdans le domaine de l'histoire positive que quand on avait mis lepied sur le sol de l'Europe.
On savait cependant que, dans cette immense contrée quis'étend entre le Nil et l'Indus, il y avait eu de grands centres decivilisation, des monarchies embrassant de vastes territoires et[II]d'innombrables tribus, des capitales plus étendues que nos capitalesmodernes de l'Occident, des palais aussi somptueux que ceuxde nos rois; et de vagues traditions disaient que leurs orgueilleuxfondateurs y avaient retracé la pompeuse histoire de leurs actions.On savait également que ces vieux peuples de l'Asie avaient laissédes traces puissantes de leur passage sur la terre. Des débrisamoncelés dans le désert et sur le rivage des fleuves, des temples,des pyramides, des monuments de toute sorte recouverts d'inscriptionsprésentant des caractères étranges, inconnus; tout ce queracontaient les voyageurs qui avaient visité ces contrées attestaitun grand développement de culture sociale. Mais cette grandeurapparaissait à travers des ruines ou dans les récits incomplets deshistoriens grecs, et dans quelques passages de la Bible. Et comme,dans ce monde primitif de l'Orient, tout revêt des proportionscolossales, on était naturellement disposé à croire que la fictionoccupait une grande place dans les récits de la Bible et dans lespages d'Hérodote.
Aujourd'hui les choses ont bien changé. Dans toutes ses branchesla science des antiquités a pris un essor qu'elle n'avait pas connujusqu'alors, et ses conquêtes ont renouvelé la face de l'histoire.Après les grandes oeuvres des érudits de la Renaissance, on croyaitconnaître à fond la civilisation de la Grèce et de Rome, et pourtantsur cette civilisation même l'archéologie est venue jeter des lueursinattendues. L'étude et l'intelligence véritable des monumentsfigurés, l'histoire de l'art, ne datent pour ainsi dire que d'hier.Winckelmann clôt le xviiie siècle, et c'est celui-ci qu'inaugure Visconti.Les innombrables vases peints et les monuments de toute naturequ'ont fourni, que fournissent encore chaque jour les nécropolesde l'Étrurie, de l'Italie méridionale, de la Sicile, de la Grèce, de laCyrénaïque et de la Crimée, constituent un champ i