Au lecteur

ŒUVRES COMPLÈTES
DE
GUY DE MAUPASSANT


LA PRÉSENTE ÉDITION

DES

ŒUVRES COMPLÈTES DE GUY DE MAUPASSANT

A ÉTÉ TIRÉE

PAR L’IMPRIMERIE NATIONALE

EN VERTU D’UNE AUTORISATION

DE M. LE GARDE DES SCEAUX

EN DATE DU 30 JANVIER 1902.


IL A ÉTÉ TIRÉ À PART

100 EXEMPLAIRES SUR PAPIER DE LUXE

SAVOIR:

60 exemplaires (1 à 60) sur japon ancien.
20 exemplaires (61 à 80) sur japon impérial.
20 exemplaires (81 à 100) sur chine.


Le texte de ce volume
est conforme à celui de l’édition originale
: Fort comme la Mort.
Paris, librairie Paul Ollendorff, 1889.


ŒUVRES COMPLÈTES

DE

GUY DE MAUPASSANT


FORT

COMME LA MORT

PARIS

LOUIS CONARD, LIBRAIRE-ÉDITEUR

17, BOULEVARD DE LA MADELEINE, 17


MDCCCCVIII

Tous droits réservés.


PREMIÈRE PARTIE.

I

Le jour tombait dans le vaste atelier par la baie ouverte du plafond.C’était un grand carré de lumière éclatante et bleue, un trou clair surun infini lointain d’azur, où passaient, rapides, des vols d’oiseaux.

Mais à peine entrée dans la haute pièce sévère et drapée, la clartéjoyeuse du ciel s’atténuait, devenait douce, s’endormait sur lesétoffes, allait mourir dans les portières, éclairait à peine les coinssombres où, seuls, les cadres d’or s’allumaient comme des feux. Lapaix et le sommeil semblaient emprisonnés 2 là dedans, la paix desmaisons d’artistes où l’âme humaine a travaillé. En ces murs que lapensée habite, où la pensée s’agite, s’épuise en des efforts violents,il semble que tout soit las, accablé, dès qu’elle s’apaise. Toutsemble mort après ces crises de vie; et tout repose, les meubles, lesétoffes, les grands personnages inachevés sur les toiles, comme si lelogis entier avait souffert de la fatigue du maître, avait peiné aveclui, prenant part, tous les jours, à sa lutte recommencée. Une vagueodeur engourdissante de peinture, de térébenthine et de tabac flottait,captée par les tapis et les sièges; et aucun autre bruit ne troublaitle lourd silence que les cris vifs et courts des hirondelles quipassaient sur le châssis ouvert, et la longue rumeur confuse de Parisà peine entendue par-dessus les toits. Rien ne remuait que la montéeintermittente d’un petit nuage de fumée bleue s’élevant vers le plafondà chaque bouffée de cigarette qu’Olivier Bertin, allongé sur son divan,soufflait lentement entre ses lèvres.

Le regard perdu dans le ciel lointain, il cherchait le sujet d’unnouveau tableau. Qu’allait-il faire? Il n

...

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