TABLE

MÉMOIRES
DE
VIDOCQ,
CHEF DE LA POLICE DE SURETÉ,
JUSQU'EN 1827,

AUJOURD'HUI PROPRIÉTAIRE ET FABRICANT DE PAPIER, A SAINT-MANDÉ.

Que l'on m'approuve ou non, j'ai la conscience d'avoir fait mondevoir; d'ailleurs, lorsqu'il s'agit d'atteindre des scélérats quisont en guerre ouverte avec la société, tous les moyens sont bons,sauf la provocation.

MÉMOIRES, tome II

TOME SECOND.



PARIS,
TENON, LIBRAIRE-ÉDITEUR,
RUE HAUTEFEUILLE, Nº 30.
1828.





MÉMOIRES
DE
VIDOCQ.

CHAPITRE XV.

Un recéleur.—Dénonciation.—Premiers rapports avec lapolice.—Départ de Lyon.—La méprise.

D'après les dangers que je courais en restant avec Roman et sa troupe,on peut se faire une idée de la joie que je ressentis de les avoirquittés. Il était évident que le gouvernement, une fois solidementassis, prendrait les mesures les plus efficaces pour la sûreté del'intérieur. Les débris de ces bandes qui, sous le nom de Chevaliers duSoleil ou de Compagnie de Jésus, devaient leur formation à l'espoird'une réaction politique, ajournée indéfiniment, ne pouvaient manquerd'être anéantis, aussitôt qu'on le voudrait. Le seul prétexte honnête deleur brigandage, le royalisme, n'existait plus, et quoique les Hiver,les Leprêtre, les Boulanger, les Bastide, les Jausion, et autres fils defamille, se fissent encore une gloire d'attaquer les courriers, parcequ'ils y trouvaient leur profit, il commençait à n'être plus du bon tonde prouver que l'on pensait bien en s'appropriant par un coup de mainl'argent de l'état. Tous ces incroyables, à qui il avait semblépiquant d'entraver, le pistolet au poing, la circulation des dépêches etla concentration du produit des impôts, rentraient dans leurs foyers,ceux qui en avaient, ou tâchaient de se faire publier ailleurs, loin duthéâtre de leurs exploits. En définitive, l'ordre se rétablissait, etl'on touchait au terme où des brigands, quelque fût leur couleur ou leurmotif, ne jouiraient plus de la moindre considération. J'aurais eu ledésir, dans de telles circonstances, de m'enrôler dans une bande devoleurs, que, abstraction faite de l'infamie que je ne redoutais plus,je m'en fusse bien gardé, par la certitude d'arriver promptement àl'échafaud. Mais une autre pensée m'animait, je voulais fuir, à quelqueprix que ce fût, les occasions et les voies du crime; je voulais resterlibre. J'ignorais comment ce vœu se réaliserait; n'importe, mon partiétait pris: j'avais fait, comme on dit, une croix sur le bagne. Presséque j'étais de m'en éloigner de plus en plus, je me dirigeai sur Lyon,évitant les grandes routes jusqu'aux environs d'Orange; là, je trouvaides rouliers provençaux, dont le chargement m'eut bientôt révélé qu'ilsallaient suivre le même chemin que moi. Je liai conversation avec eux,et comme ils me paraissaient d'assez bonnes gens, je n'hésitai pas àleur dire que j'étais déserteur, et qu'ils me rendraient un très grandservice, si, pour m'aider à mettre en défaut la vigilance des gendarmes,ils consentaient à m'impatroniser parmi eux. Cette proposition ne leurcausa aucune espèce de surprise: il semblait qu'ils se fussent attendusque je réclame

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