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LE CORRICOLO

par

ALEXANDRE DUMAS.

PREMIÈRE PARTIE.

Introduction

Le corricolo est le synonyme de calessino, mais comme il n'y apas de synonyme parfait, expliquons la différence qui existe entre lecorricolo et le calessino.

Le corricolo est un espèce de tilbury primitivement destiné à contenirune personne et à être attelé d'un cheval; on l'attelle de deuxchevaux, et il charrie de douze à quinze personnes.

Et qu'on ne croie pas que ce soit au pas, comme la charrette à boeufsdes rois francs, ou au trot, comme le cabriolet de régie; non, c'estau triple galop; et le char de Pluton, qui enlevait Proserpine sur lesbords du Symète, n'allait pas plus vite que le corricolo qui sillonneles quais de Naples en brûlant un pavé de laves et en soulevant leurpoussière de cendres.

Cependant un seul des deux chevaux tire véritablement: c'est letimonier. L'autre, qui s'appelle le bilancino, et qui est attelé decôté, bondit, caracole, excite son compagnon, voilà tout. Quel dieu,comme à Tityre, lui a fait ce repos? C'est le hasard, c'est laProvidence, c'est la fatalité: les chevaux, comme les hommes, ont leurétoile.

Nous avons dit que ce tilbury, destiné à une personne, en charriaitd'ordinaire douze ou quinze; cela, nous le comprenons bien, demandeune explication. Un vieux proverbe français dit: «Quand il y en apour un, il y en a pour deux.» Mais je ne connais aucun proverbe dansaucune langue qui dise: «Quand il y en a pour un, il y en a pourquinze.»

Il en est cependant ainsi du corricolo, tant, dans les civilisationsavancées, chaque chose est détournée de sa destination primitive!

Comment et en combien de temps s'est faite cette agglomérationsuccessive d'individus sur le corricolo, c'est ce qu'il est impossiblede déterminer avec précision. Contentons-nous donc de dire commentelle y tient.

D'abord, et presque toujours, un gros moine est assis au milieu, etforme le centre de l'agglomération humaine que le corricolo emportecomme un de ces tourbillons d'âmes que Dante vit suivant un grandétendard dans le premier cercle de l'enfer. Il a sur un de ses genouxquelque fraîche nourrice d'Aversa ou de Nettuno, et sur l'autrequelque belle paysanne de Bauci ou de Procida; aux deux côtés dumoine, entre les roues et la caisse, se tiennent debout les maris deces dames. Derrière le moine se dresse sur la pointe des pieds lepropriétaire ou le conducteur de l'attelage, tenant de la main gauchela bride, et de la main droite le long fouet avec lequel il entretientd'une égale vitesse la marche de ses deux chevaux. Derrière celui-cise groupent à leur tour, à la manière des valets de bonne maison, deuxou trois lazzaroni, qui montent, qui descendent, se succèdent, serenouvellent, sans qu'on pense jamais à leur demander un salaire enéchange du service rendu. Sur les deux brancards sont assis deuxgamins ramassés sur la route de Torre del Greco ou de Pouzzoles,ciceroni surnuméraires des antiquités d'Herculanum et de Pompéia,guides marrons des antiquités de Cumes et de Baïa. Enfin, sousl'essieu de la voiture, entre les deux roues, dans un filet à grossesmailles qui va ballottant de haut en bas, de long en large, grouillequelque chose d'informe, qui rit, qui pleure, qui crie, qui hogne, quise plaint, qui chante, qui raille, qu'il est impossible de distinguerau milieu de la poussière que soulèvent les pieds des chevaux: ce son

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