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HISTOIRE
DE MA VIE
PAR
Mme GEORGE SAND.
Telle est l'épigraphe du livre que j'entreprends.
15 avril 1847.
GEORGE SAND.
TOME DIXIÈME.
PARIS, 1855.
LEIPZIG, CHEZ WOLFGANG GERHARD.
Retraite à Nohant.—Travaux d'aiguille moralement utiles auxfemmes.—Équilibre désirable entre la fatigue et le loisir.—Monrouge-gorge.—Deschartres quitte Nohant.—Naissance de monfils.—Deschartres à Paris.—Hiver de 1824 à Nohant.—Changemenset améliorations qui me donnent le spleen.—Été au Plessis.—Lesenfans.—L'idéal dans leur société.—Aversion pour la viepositive.—Ormesson.—Nous revenons à Paris.—L'abbé de Prémord.—Retraiteau couvent.—Aspirations à la vie monastique.—Mauriceau couvent.—Sœur Hélène nous chasse.
Je passai à Nohant l'hiver de 1822-1823,assez malade, mais absorbée par le sentiment del'amour maternel, qui se révélait à moi à traversles plus doux rêves et les plus vives aspirations.La transformation qui s'opère à ce moment dansla vie et dans les pensées de la femme est, engénéral, complète et soudaine. Elle le fut pourmoi comme pour le grand nombre. Les besoinsde l'intelligence, l'inquiétude des pensées, lescuriosités de l'étude, comme celles de l'observation,tout disparut aussitôt que le doux fardeause fit sentir, et même avant que ses premierstressaillemens m'eussent manifesté son existence.La Providence veut que, dans cette phase d'attenteX p. 6et d'espoir, la vie physique et la vie de sentimentprédominent. Aussi, les veilles, les lectures,les rêveries, la vie intellectuelle en un mot, futnaturellement supprimée, et sans le moindremérite ni le moindre regret.
L'hiver fut long et rude, une neige épaissecouvrit longtemps la terre durcie d'avance parde fortes gelées. Mon mari aimait aussi la campagne,bien que ce fût autrement que moi, et,passionné pour la chasse, il me laissait de longsloisirs que je remplissais par le travail de lalayette. Je n'avais jamais cousu de ma vie. Touten disant que cela était nécessaire à savoir, magrand'mère ne m'y avait jamais poussée, et jem'y croyais d'une maladresse extrême. Maisquand cela eut pour but d'habiller le petit êtreque je voyais dans tous mes songes, je m'y jetaiavec une sorte de passion. Ma bonne Ursulevint me donner les premières notions du surjetet du rabattu. Je fus bien étonnée de voir combiencela était facile; mais en même temps jecompris que là, comme dans tout, il pouvait y avoirl'invention, et la maëstria du coup