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COLLECTION MICHEL LÉVY

OEUVRES COMPLÈTES DE HENRI CONSCIENCE

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HISTOIRE DE DEUX ENFANTS D'OUVRIERS

PAR
HENRI CONSCIENCE

NOUVELLE ÉDITION, PARIS, CALMANN LÉVY, ÉDITEUR,ANCIENNE MAISON MICHEL LÉVY FRÈRES,RUE AUBER, 3, ET BOULEVARD DES ITALIENS, 15,À LA LIBRAIRIE NOUVELLE

1879

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HISTOIRE DE DEUX ENFANTS D'OUVRIERS

I.

Cette grande maison, avec ses cent fenêtres que l'on voit sur le pont duMoulin, à Gand, est la fabrique de coton de M. Raemdonck. Quoique le jourbaisse, tout y est encore en pleine activité. La lourde bâtisse tremblejusque dans ses fondements, sous le mouvement des mécaniques que faitmarcher la vapeur.

C'est d'abord le diable, cette puissante machine dans laquelle lecoton est battu, secoué et foulé jusqu'à ce qu'il soit expurgé de toutcorps étranger. Puis les cordes, les instruments de tension et leslanternes ou pots tournants qui, tous ensemble, changent la laine végétaleen flocons de neige, la mêlent, la divisent et la préparent, pour êtreconvertie par les machines à filer en un fil mince comme un cheveu. Puisles cardeuses, et enfin les métiers des tisserands et les barres desfileurs avec leurs broches et leurs bobines innombrables. Tout, du haut enbas, se meut, court et s'agite avec une rapidité fiévreuse. C'est uneinfinité d'essieux qui pivotent, de roues qui tournent, d'engrenages quigrincent, de courroies qui se déroulent, de métiers qui s'agitent et defuseaux qui ronflent. Chaque mouvement produit un bruit qui se mêleaux autres bruits pour former une espèce de roulement de tonnerre, ungrondement énervant si intense et si continu, qu'il absorbe toute lapensée du visiteur que le hasard amène en ces lieux, et l'étourdit commele sifflement des vents déchaînés sur une mer furieuse.

Tandis que le fer et le feu y remplissent tout de leur vie et de leur voix,l'homme erre comme un muet fantôme parmi les gigantesques machines queson génie a créées. Il y a là des hommes, des femmes, des enfants en masse;ils surveillent la marche des rouages, ils rattachent les fils rompus,ils placent du coton sur les bobines et fournissent sans cesse desaliments au monstre à cent bras qui semble dévorer la matière avec uneavidité insatiable.

Voyez comme tous, hommes et femmes, vont et viennent entre les rouagespresque sans précaution! comme les enfants passent en rampant sous lesmoulins à filer! Et cependant qu'une courroie, une dent, une de toutes ceschoses qui pivotent touche leur blouse… et le fer impitoyable arracheraleurs membres ou broiera leur corps, et ne le lâchera que pour le rejeterplus loin comme une masse informe. Ah! combien d'imprudents ouvriersont été dévorés par cette force brutale et aveugle, qui ne fait pas dedifférence entre le coton et la chair humaine!

Mais un coup de cloche a retenti! Le chauffeur arrête la machine, il ôteaux mécaniques la respiration et la vie… et au bruit formidable, augrondement assourdissant, succède le silence de la solitude et du repos…

C'était par une soirée de l'été de 1

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