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[Illustration]
En préparation:
PARIS PAUL OLLENDORFF, ÉDITEUR 28 bis, RUE DE RICHELIEU
1890
Tous droits de traduction et de reproduction réserves pour tous les paysy compris la Suède et la Norvège.
Cinq exemplaires sur papier du Japon, 1 à 5; Cent exemplaires sur papierde Hollande, 6 à 105.
J'ai quitté Paris et même la France, parce que la tour Eiffel finissaitpar m'ennuyer trop.
Non seulement on la voyait de partout, mais on la trouvait partout,faite de toutes les matières connues, exposée à toutes les vitres,cauchemar inévitable et torturant.
Ce n'est pas elle uniquement d'ailleurs qui m'a donné une irrésistibleenvie de vivre seul pendant quelque temps, mais tout ce qu'on a faitautour d'elle, dedans, dessus, aux environs.
Comment tous les journaux vraiment ont-ils osé nous parlerd'architecture nouvelle à propos de cette carcasse métallique, carl'architecture, le plus incompris et le plus oublié des artsaujourd'hui, en est peut-être aussi le plus esthétique, le plusmystérieux et le plus nourri d'idées?
Il a eu ce privilège à travers les siècles de symboliser pour ainsi direchaque époque, de résumer, par un très petit nombre de monumentstypiques, la manière de penser, de sentir et de rêver d'une race etd'une civilisation.
Quelques temples et quelques églises, quelques palais et quelqueschâteaux contiennent à peu près toute l'histoire de l'art à travers lemonde, expriment à nos yeux mieux que des livres, par l'harmonie deslignes et le charme de l'ornementation, toute la grâce et la grandeurd'une époque.
Mais je me demande ce qu'on conclura de notre génération si quelqueprochaine émeute ne déboulonne pas cette haute et maigre pyramided'échelles de fer, squelette disgracieux et géant, dont la base semblefaite pour porter un formidable monument de Cyclopes et qui avorte en unridicule et mince profil de cheminée d'usine.
C'est un problème résolu, dit-on. Soit,—mais il ne servait à rien!—etje préfère alors à cette conception démodée de recommencer la naïvetentative de la tour de Babel, celle qu'eurent, dès le douzième siècle,les architectes du campanile de Pise.
L'idée de construire cette gentille tour à huit étages de colonnes demarbre, penchée comme si elle allait toujours tomber, de prouver à lapostérité stupéfaite que le centre de gravité n'est qu'un préjugéinutile d'ingénieur et que les monuments peuvent s'en passer, êtrecharmants tout de même, et faire venir après sept siècles plus devisiteurs